MÉMOIRE ET CONRÔLE - L'IMPACT COLONIAL DE L'HÔPITAL AVICENNE ET DU CIMETIÈRE MUSULMAN DE BOBIGNY

L'hôpital franco-musulman de Bobigny (aujourd'hui Avicenne) et le cimetière musulman adjacent sont des témoins emblématiques du patrimoine colonial français. L’hôpital, construit en 1935 dans un style néomauresque, était destiné à soigner exclusivement les populations musulmanes nord-africaines, avec des services adaptés à leurs pratiques religieuses, mais aussi un instrument de contrôle sous la supervision du SSPINA SSPINA (Service de surveillance, de protection et d'assistance des indigènes nord-africains). Ce site symbolise la double logique coloniale : une "philanthropie coloniale" ambiguë qui allie soin et répression, et la stigmatisation des musulmans par des préjugés raciaux et médicaux, justifiant la ségrégation sanitaire.

Le cimetière musulman de Bobigny, créé en 1937, est le premier cimetière exclusivement musulman en France métropolitaine. Il représente à la fois un lieu de mémoire et un symbole de la reconnaissance de la présence musulmane dans l’Empire colonial, tout en illustrant les dynamiques de contrôle de cette population. Sa gestion a évolué, passant d’un lieu réservé aux indigènes à un carré musulman intercommunal payant, tout en reflétant la diversité des communautés musulmanes en France.

Ces sites sont des vestiges vivants d’une histoire coloniale complexe, mêlant contrôle, reconnaissance et ségrégation. Ils offrent une perspective sur les enjeux contemporains liés à l’immigration, à la mémoire coloniale et à l’intégration des populations musulmanes. Les critiques anticoloniales de l’époque, dénonçant cette séparation imposée et réclamant l’égalité d’accès aux soins, sont des éléments clés pour comprendre la dynamique de ségrégation et d’opposition qui traversent cette histoire. Ce patrimoine, souvent ignoré, invite à une réflexion sur la manière dont l’héritage colonial continue d’influencer la France d’aujourd’hui.